Béranger Laymond
Portrait de l’artiste
La peinture de Béranger Laymond semble n’avoir jamais séché. Tout est liquide, glisse d’un espace à l’autre, d’un support à l’autre, d’un motif à l’autre, d’une couleur à l’autre. Le ruban de Möbius que dessine ce travail qui s’autoréférence, qui tourne sans cesse sur lui-même, engloutit paradoxalement une myriade de références hétérogènes et d’univers éclectiques. Fasciné par la complexe histoire de la peinture, Béranger Laymond puise dans un répertoire de formes patiemment collectionnées, à la manière de l’atlas Mnémosyne d’Aby Warburg, puis compose comme un artiste classique, avant de peindre comme un baroque. Adoptant une attitude de fan, allant jusqu’à se qualifier « d’espion industriel », il observe avec avidité la peinture des maîtres de la Renaissance comme de ses contemporain·e·s sans aucune forme de hiérarchie, avec le même fétichisme de groupie.
Sa culture cinématographique fait de lui un peintre de l’image, qui évacue systématiquement le hors cadre et qui construit ses peintures à l’aide d’une succession de plans superposés, de jeux de transparence et d’opacité. S’ils sont verticaux, ses grands formats à l’échelle du corps pourraient être les espaces de fictions tragiques du septième art, comme les films de Ken Russel ou de Brian De Palma, utilisant dans différents registres le sublime au service du kitsch (ou serait-ce l’inverse ?)
Pour mettre au point ce langage très formel et empirique, Béranger Laymond ajoute et soustrait, comme dans une formule mathématique, des formes, des matières, des teintes. Pour autant, la rigueur du procédé, probablement inspirée des minimalistes américains, est vite parasitée par les couleurs acides, les gestes improvisés, les coulures crasses qui rappellent davantage le travail de Jonathan Meese, oscillant entre expressionnisme et actionnisme. Pour mieux se laisser surprendre, pour se perdre entre les strates des mondes qui surgissent de la toile, il s’agit pour Béranger Laymond de peindre vite, de s’approprier les accidents, de s’éloigner des références, de s’autoriser les caprices, et de toujours rester à l’affût des trouvailles. Rien n’est rationnel, prémédité, anticipé. Tout est affaire de contrastes : déchiré et plein, seul et multiple, géométrique et organique, calme et nerveux. Dans un univers abstrait apparaît parfois, non sans humour, un motif pictural réaliste, comme « copier/coller » d’une autre réalité, un anachronisme fantasque déconstruisant la sacrosainte authenticité moderniste.
Les couleurs criardes, les associations bavardes, la surabondance d’informations, produisent une cacophonie visuelle évoquant le travail aussi frontal qu’insaisissable de Josh Smith. Dans un processus de négociation permanente, les formes et les couleurs se font écho, se regardent dans l’espace de la peinture mais aussi en dehors. Les toiles libres sont suspendues par des œillets ou du Velcro sur des supports en fer forgé, qui semblent sortir du décor. Ces bannières médiévales, aux couleurs tuning, associées entre elles par des mousquetons d’escalade, deviennent des installations où le motif sinueux d’une forme peinte fait écho aussi bien drapé de la toile elle-même, qu’aux courbes des rubans de métal qui l’accueillent.
Le hors-champ, évacué de la peinture, est omniprésent dans l’espace ; les jeux de double, de recto verso, de reflet sur du Mylar et d’interférences produisent des aberrations rococo, non sans rappeler les peintures disséquées de Kerstin Brätsch. Au delà d’un travail de peintre, ce type de pratique interroge les caractéristiques même du médium, et ses potentielles transformations portées par un désir irrépressible de faire exister les images.
À la manière du duo d’artistes suisse Linus Bill et Adrien Horni, Béranger Laymond transpose, répète et associe sans cesse ses pièces pour en multiplier les lectures. Les titres fleuves qu’il donne à ses œuvres, se gardant bien d’en proposer une interprétation unique, à l’heure de l’omniprésence d’images aux messages autoritaires, laissent apercevoir les infinies possibilités narratives de ces mondes surréalistes déployés hors du cadre.
Sa culture cinématographique fait de lui un peintre de l’image, qui évacue systématiquement le hors cadre et qui construit ses peintures à l’aide d’une succession de plans superposés, de jeux de transparence et d’opacité. S’ils sont verticaux, ses grands formats à l’échelle du corps pourraient être les espaces de fictions tragiques du septième art, comme les films de Ken Russel ou de Brian De Palma, utilisant dans différents registres le sublime au service du kitsch (ou serait-ce l’inverse ?)
Pour mettre au point ce langage très formel et empirique, Béranger Laymond ajoute et soustrait, comme dans une formule mathématique, des formes, des matières, des teintes. Pour autant, la rigueur du procédé, probablement inspirée des minimalistes américains, est vite parasitée par les couleurs acides, les gestes improvisés, les coulures crasses qui rappellent davantage le travail de Jonathan Meese, oscillant entre expressionnisme et actionnisme. Pour mieux se laisser surprendre, pour se perdre entre les strates des mondes qui surgissent de la toile, il s’agit pour Béranger Laymond de peindre vite, de s’approprier les accidents, de s’éloigner des références, de s’autoriser les caprices, et de toujours rester à l’affût des trouvailles. Rien n’est rationnel, prémédité, anticipé. Tout est affaire de contrastes : déchiré et plein, seul et multiple, géométrique et organique, calme et nerveux. Dans un univers abstrait apparaît parfois, non sans humour, un motif pictural réaliste, comme « copier/coller » d’une autre réalité, un anachronisme fantasque déconstruisant la sacrosainte authenticité moderniste.
Les couleurs criardes, les associations bavardes, la surabondance d’informations, produisent une cacophonie visuelle évoquant le travail aussi frontal qu’insaisissable de Josh Smith. Dans un processus de négociation permanente, les formes et les couleurs se font écho, se regardent dans l’espace de la peinture mais aussi en dehors. Les toiles libres sont suspendues par des œillets ou du Velcro sur des supports en fer forgé, qui semblent sortir du décor. Ces bannières médiévales, aux couleurs tuning, associées entre elles par des mousquetons d’escalade, deviennent des installations où le motif sinueux d’une forme peinte fait écho aussi bien drapé de la toile elle-même, qu’aux courbes des rubans de métal qui l’accueillent.
Le hors-champ, évacué de la peinture, est omniprésent dans l’espace ; les jeux de double, de recto verso, de reflet sur du Mylar et d’interférences produisent des aberrations rococo, non sans rappeler les peintures disséquées de Kerstin Brätsch. Au delà d’un travail de peintre, ce type de pratique interroge les caractéristiques même du médium, et ses potentielles transformations portées par un désir irrépressible de faire exister les images.
À la manière du duo d’artistes suisse Linus Bill et Adrien Horni, Béranger Laymond transpose, répète et associe sans cesse ses pièces pour en multiplier les lectures. Les titres fleuves qu’il donne à ses œuvres, se gardant bien d’en proposer une interprétation unique, à l’heure de l’omniprésence d’images aux messages autoritaires, laissent apercevoir les infinies possibilités narratives de ces mondes surréalistes déployés hors du cadre.