Claire Dantzer - L’arrière boutique
À l’occasion de la sortie de résidence de Claire Dantzer à la Maison Rosière (résidence Voyons Voir, art contemporain et territoire)
L’exposition L’arrière boutique de Claire Dantzer est le fruit d’une résidence de recherche débutée en juillet 2023 au sein d’une confiserie emblématique à Marseille, la Maison Rosière. Véritablement tentaculaire, ce projet au long cours s’est progressivement déployé en rhizome depuis l’histoire d’une entreprise familiale de production de dragées jusqu’à notre rapport à l’amour. Les œuvres exposées relatent quelques étapes de ce voyage, à l’image des chapitres d’une biographie paradoxalement collective, allant des souvenirs d’enfance aux champs d’amandiers en fleur en passant devant la vitrine d’une boutique endormie qui regorge de trésors kitsch.
La dragée, présente dans les trois religions du livre, est une confiserie hautement symbolique, dont l’amande, cultivée dans tout le bassin Méditerranéen, représente selon différents mythes et contes populaires la virginité, la chance, la fertilité, l’amour… Claire Dantzer s’est plongée dans l’histoire de Phyllis, transformée en amandier par les dieux après s’être donné la mort, convaincue que son amour Démophon ne reviendrait pas, ou encore dans l’histoire d’Agdistis, enfant terrible de Zeus et Gaïa, dont l’émasculation violente a laissé place à un amandier sur le sol rougi de son sang.
Puis l’artiste s’est intéressée à la fabrication de la dragée, tout d’abord en remontant l’ensemble de la filière agricole, de la floraison des amandiers au ramassage des fruits, puis au tri à la main, à la production du sucre, et à l’art du tissage des paniers de présentation, avant de questionner plus largement ce qui justifie l’ensemble de ces gestes : notre rapport à l’amour. À la manière d’Edgar Morin et de Jean Rouch dans « Chronique d’un été », elle a recueilli les définitions souvent conventionnelles de l’amour faites par différent·e·s travailleurs et travailleuses rencontré·e·s dans les champs, les usines, les boutiques… Les voix de quelques enfants s’y ajoutent, comme les réminiscences fugaces du passé des adultes.
Ces témoignages intimes associés aux images fascinantes tournées dans les champs comme à l’atelier, aussi contemplatives que composées, s’apparentent à de véritables tableaux romantiques en mouvement. Les gestes répétitifs des ouvrier·e·s au travail deviennent alors une chorégraphie hypnotique sur fond de musique expérimentale bruitiste. Ici encore, entre l’agriculture millénaire et la production industrielle de bonbons colorés, entre la tradition antique de la noce et son actualisation perpétuelle, l’artiste cherche à mettre en lumière l’évolution des stéréotypes de l’amour.
La vie de la confiserie, fondée en 1923 par un couple d’arméniens fuyant la guerre, nous est racontée par bribes par leur fille. Elle évoque la maison de famille faisant face au Château Rosière, ses volets qui collent et l’odeur du sucre qui envahit le quartier, les booms organisées dans le garage par les ados, puis la reprise de l’activité par son frère, qui développe alors la production renommée des dragées traditionnelles… Au-delà de cette histoire individuelle, aussi parcellaire que signifiante, l’artiste s’intéresse en filigrane à Marseille, aux travailleurs·ses qui y vivent et aux différentes mutations qui ont façonnée l’identité même de la ville.
Dans l’espace d’exposition – situé sur l’avenue Rosière, à quelques numéros de la première adresse de la confiserie –, d’étranges sculptures en osier, ornées de rubans et de fleurs en plastique, artéfacts témoins du commerce des célèbres friandises, s’apparentent à des reliques surgissant d’une époque révolue. Ces objets, faisant se rencontrer la technique traditionnelle de la vannerie et des motifs contemporains, sont des marqueurs de la culture populaire et de ses transformations.
À travers les œuvres et les recherches qui constituent L’arrière boutique, Claire Dantzer propose d’écrire un récit singulier fait de références multiples, d’anachronismes joyeux et de métaphores sensibles. À première vue, aussi désuet que le petit ballotin de dragées offert lors d’un mariage, le sentiment amoureux, universel, continue de produire des formes omniprésentes dans la culture populaire, d’engendrer des mythes contemporains, de susciter de nouveaux rituels et de nourrir sans cesse les imaginaires.
La dragée, présente dans les trois religions du livre, est une confiserie hautement symbolique, dont l’amande, cultivée dans tout le bassin Méditerranéen, représente selon différents mythes et contes populaires la virginité, la chance, la fertilité, l’amour… Claire Dantzer s’est plongée dans l’histoire de Phyllis, transformée en amandier par les dieux après s’être donné la mort, convaincue que son amour Démophon ne reviendrait pas, ou encore dans l’histoire d’Agdistis, enfant terrible de Zeus et Gaïa, dont l’émasculation violente a laissé place à un amandier sur le sol rougi de son sang.
Puis l’artiste s’est intéressée à la fabrication de la dragée, tout d’abord en remontant l’ensemble de la filière agricole, de la floraison des amandiers au ramassage des fruits, puis au tri à la main, à la production du sucre, et à l’art du tissage des paniers de présentation, avant de questionner plus largement ce qui justifie l’ensemble de ces gestes : notre rapport à l’amour. À la manière d’Edgar Morin et de Jean Rouch dans « Chronique d’un été », elle a recueilli les définitions souvent conventionnelles de l’amour faites par différent·e·s travailleurs et travailleuses rencontré·e·s dans les champs, les usines, les boutiques… Les voix de quelques enfants s’y ajoutent, comme les réminiscences fugaces du passé des adultes.
Ces témoignages intimes associés aux images fascinantes tournées dans les champs comme à l’atelier, aussi contemplatives que composées, s’apparentent à de véritables tableaux romantiques en mouvement. Les gestes répétitifs des ouvrier·e·s au travail deviennent alors une chorégraphie hypnotique sur fond de musique expérimentale bruitiste. Ici encore, entre l’agriculture millénaire et la production industrielle de bonbons colorés, entre la tradition antique de la noce et son actualisation perpétuelle, l’artiste cherche à mettre en lumière l’évolution des stéréotypes de l’amour.
La vie de la confiserie, fondée en 1923 par un couple d’arméniens fuyant la guerre, nous est racontée par bribes par leur fille. Elle évoque la maison de famille faisant face au Château Rosière, ses volets qui collent et l’odeur du sucre qui envahit le quartier, les booms organisées dans le garage par les ados, puis la reprise de l’activité par son frère, qui développe alors la production renommée des dragées traditionnelles… Au-delà de cette histoire individuelle, aussi parcellaire que signifiante, l’artiste s’intéresse en filigrane à Marseille, aux travailleurs·ses qui y vivent et aux différentes mutations qui ont façonnée l’identité même de la ville.
Dans l’espace d’exposition – situé sur l’avenue Rosière, à quelques numéros de la première adresse de la confiserie –, d’étranges sculptures en osier, ornées de rubans et de fleurs en plastique, artéfacts témoins du commerce des célèbres friandises, s’apparentent à des reliques surgissant d’une époque révolue. Ces objets, faisant se rencontrer la technique traditionnelle de la vannerie et des motifs contemporains, sont des marqueurs de la culture populaire et de ses transformations.
À travers les œuvres et les recherches qui constituent L’arrière boutique, Claire Dantzer propose d’écrire un récit singulier fait de références multiples, d’anachronismes joyeux et de métaphores sensibles. À première vue, aussi désuet que le petit ballotin de dragées offert lors d’un mariage, le sentiment amoureux, universel, continue de produire des formes omniprésentes dans la culture populaire, d’engendrer des mythes contemporains, de susciter de nouveaux rituels et de nourrir sans cesse les imaginaires.