Les coulisses du plateau,
portrait de Naomi Maury


Il s’agit d’une promenade, ou plutôt d’une dérive. Le corps ici, sans trajectoire imposée, enjambe, contourne, dépasse, effleure ou frôle. Il est l’acteur principal sur un plateau de théâtre au décor surréaliste. Pas de socles, d’étais ni d’accroches : les sculptures tremblent, frémissent, vacillent et semblent toutes se maintenir dans un (des)équilibre précaire. Ont-elles été, ou vont-elles être activées sur scène ?

Ce qui est donné à voir s’apparente à un « état » de sculpture dans un espace-temps donné, laissant supposer les transformations, les détériorations ou les minces réparations dont les pièces ont fait et feront encore l’objet, avant peut-être, de disparaître. Les sculptures de Naomi Maury, souvent in situ, sont suspendues entre différentes temporalités et donc garantes d’une expérience sensible éphémère : elles ne sauraient être présentées une seconde fois dans cet exact équilibre (Abris, 2016.), réfléchissant ce rayon de soleil (Se dorer la pilule, 2016), diffusant cette odeur (Ciment sous eau, 2015) ou encore la musique de la pluie (Quand vient la pluie, 2015). Dans un mouvement perpétuel, les sculptures empruntent de la matière aux précédentes, se répondent, s’alimentent, conversent en silence. Naomi Maury se plaît à préciser que toutes finissent par lui échapper, qu’il faut les « laisser vivre ». Les œuvres, comme la pensée, en constante évolution, ne seront jamais exactement les mêmes qu’hier ou que demain.

Au sein de ces sculptures, la nature et la chimie, lasses de se faire concurrence, s’associent, créant d’incongrus assemblages où la cohabitation de matériaux antinomiques – naturels et manufacturés – semble devenir possible (Pierre au repos/ nape for stone, 2016). Serait-ce la mise en forme d’un futur que l’on espère proche ?

Souvent composé d’éléments structurels habituellement dissimulés ou d’outils nécessaires à la construction, le travail de Naomi Maury flirte avec l’architecture. Le dessin d’atelier gardé secret devient volume, la ligne circonscrivant la forme, révélant alors une possible infrastructure sous-jacente. En utilisant, avec une grande économie de moyen, les matériaux que l’on cache, l’artiste met en lumière les coulisses du plateau : peut-être est-ce là qu’aura lieu le spectacle après tout, dans un quotidien hors-scène, sur la plage ou en haut d’un mont, sous la ligne d’horizon (Et en haut du mont l’horizon, 2016). Ici, dans cet ailleurs, les règles de la physique ont disparu, les roues ne sont plus circulaires (La roue, 2016), le papier remplace la pierre (Capitelle, 2015), et les immeubles, au risque de s’envoler, s’amarrent comme des navires (L’ancré, 2015).

Les sculptures, de divers formats, sont maquettes à l’échelle de la main ou (dé)constructions globales qu’il s’agira « d’habiter ». Chaque œuvre, indépendante, autonome, parfois presque autarcique, est pourtant partie d’un tout plus grand, d’un groupe, d’une « famille » présentée dans l’espace d’exposition, où « l’attitude » du spectateur fait lien. Ici se manifeste la question poétique de l’occupation d’un espace par le corps ; celui d’une sculpture, d’une exposition ou d’un bâtiment.

Quelqu’en soit l’échelle, peut-être faut-il y voir autant de paysages, dont la contemplation passive est impossible : il s’agit d’être « là », de « faire corps » avec ce paysage au risque de s’y heurter.



Naomi Maury, Abris, 2016 (vue de l’exposition ABRIS à la MAPRAA Lyon). Céramiques porcelaine et grès, tasseaux, émaux. Courtesy artiste


Naomi Maury, Cela me paraît bien mollasson, non ?, 2016-2017. Matériaux mixtes. Courtesy artiste 


Naomi Maury, Et en haut du mont l’horizon, 2016 (vue de l’exposition Avant que jeunesse à l’école des beaux arts de Sète). Matériaux mixtes. Courtesy artiste 


Naomi Maury, Parfois on marchait jusqu’à l’épuisement de nos pieds, il fallait qu’on trouve un moyen pour se reposer, 2017 (vue de l’exposition de La Vitrine à l’ ADERA Lyon). Trépieds, son, nébuleuse, eau, dessins, papier mâché, glycéro. Courtesy artiste








Leïla Couradin


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EXPOSITIONS


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Rien n’est vrai, tout est vivant - ESAPB

Charlotte Alves - Un trou dans le sable 

FUTURIBLES - avec Hilary Galbreaith, Andréa Le Guellec, Tania Gheerbrant, Sacha Rey, Baptiste Verrey

Camille Boileau - Le jardin des possibles 

Jeanne Chopy - Le rideau bouge encore ~

Lisa Duroux et Julie Kieffer - De cadence et d’amour

Adélaïde Feriot - Polaris

Bettina Samson - Spectral Summer, Le Parc Saint Léger 

Bénédicte Lacorre - Did something real happen ?

Vincent Gallais - L’instant de plus

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La fête de l’insignifiance - exposition collective, Kunsthalle de Mulhouse 

Carla Adra - Bouche 

Léo Sallez - Relais des gourmets 

Victoria David - Snow Gum




TEXTES  


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Lisa Duroux & Guillaume Perez - 
Loges, jardin, rivière

Béranger Laymond - Portrait

Xavier Veilhan, De plain-pied -FRAC Pays de la Loire 

Elodie Rougeaux - Portrait

Trepasing Threshold

Nawel Grant - Portrait 

Vega Lopez - Portrait 

Frédérique Fleury 

Catalogue de l’exposition de l’EMAP Corbas - notices

Camille Sart - Entretien (Résidence Voyons Voir)

Rémi Lécussan - Entretien (Résidence Voyons Voir) 

Brontë Scott - Entretien
(Résidence Voyons Voir) 

Amalia Laurent - L’édifice immense du souvenir, exposition au CACN

Collection du FRAC île de France - notices

Collection de EAP Vénissieux - notices

Valentin Martre - Sortie de Résidence Voyons Voir au Chantier Naval Borg

Un calamar à la surface, Rémi Lécussan, Ludovic Hadjeras, Benoît Pype

Amalia Laurent - Entretien, POST it RÉALITÉS

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Celine Pierre - Entretien, Point Contemporain 

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Marianne Villière - Entretien, POST it #08

Romuald Jandolo - Entretien, CARF 03

Baptiste Charneux - Entretien, POST it #06

Anaëlle Rambaud - Entretien, POST it #04

Carla Adra - Entretien, POST it #02

Corentin Canesson - Entretien, CARF 02

Thomas Schmahl - Portrait, Point Contemporain

Predicted Autumn, Jochen Lempert, La belle revue 

L’odeur du ciel, Damien Fragnon et Naomi Maury, Tzvetnik

Radio, Katinka Bock, Point Contemporain

Pavillon, Guillaume Perez, Artaïs 

Les conventions ordinaires, Chloé Serre, La BF15, Zérodeux 

Partout, mais pas pour très longtemps, Convoi exceptionnel, Point Contemporain

Peaux des murs, Claire Georgina Daudin, Point Contemporain

Night Soil - Nocturnal Gardening, Mélanie Bonajo, La critique 

Entre-temps, portrait de Rémi De Chiara, Point contemporain

Cleptomanie Sentimentale, collection Saves, Point contemporain

Les coulisses du plateau, portrait de Naomi Maury, Point contemporain 

Sous la surface, portrait de Julie Digard, Point contemporain 

Eloge de l’imprévu, portrait de Damien Fragnon, Point contemporain

Le divan des murmures, exposition collective au Frac Auvergne, Zérodeux 

La Fête, La Musique, La Noce, Maria Loboda, Zérodeux 

Le monde ou rien, exposition collective au Gac Annonay, La belle revue 

Images évanescentes et dessins absents, Claire Georgina Daudin, Le mauvais coton

Les bruits silencieux, Olivier Zabat, Le mauvais coton

Dancing in the Studio, Pedro Barateiro, Le mauvais coton

Etoffes à décor de circonstance, Joséphine Kaeppelin, Le mauvais coton

Conversations silencieuses, exposition collective au Réverbère, Le mauvais coton

Marcher à la dérive, Alex Chevalier et Guillaume Perez, Le mauvais coton

Les éléphants se cachent pour mourir, Maxime Lamarche, Le mauvais coton

Promenade urbaine en négatif, Sehyong Yang, Le mauvais coton

Histoire des ensembles, Mathilde Chénin, Le mauvais coton

Cave Studies, Vincent Broquaire, Le mauvais coton